Note de service en forme d'excuse

Mercredi 4 décembre 2019

Vous êtes plusieurs à m'avoir laissé des commentaires sur mes derniers billets... Ils étaient dans la file "en attente de modération" sur Blogger et je n'avais reçu aucune notification! :/ C'est réparé, vos commentaires sont postés. Je vais aller modifier les paramètres.

Toutes mes excuses !!!

(du coup, je vous ai répondu, mais encore faudrait-il que vous vous souveniez où vous aviez posté... C'était sur "La Volte", "Drunk Movement IV" et "Et enfin le silence"...)

Être

Mardi 3 décembre 2019, 20h33
D-Side-Elegy-H'n'H

Je crois que j'ai compris pourquoi je n'arrivais pas à me sentir proche des militants, quelle que soit leur cause. Leur monde est petit. Une fois qu'ils se sont engagés, ils ne voient plus qu'à travers ce prisme et ils analysent tout à travers lui, le "système" et les gens. Sur un blog féministe, un homme devient un hétéro cis. Sur un blog écolo, les gens deviennent des consuméristes aveugles. Pour un militant CGT, un patron dirige forcément une multinationale. Y'a plus de nuances, plus d'individus, juste des rouages.

♫ Ministry - Just one fix

D'après ce que j'en comprends, beaucoup de gens qui rejoignent un mouvement cherchaient, à l'origine, un sens ou un but. Ils sont heureux quand ils trouvent leur meute (terme absolument pas péjoratif dans ma bouche). Ils sont confortés, ils se sentent plus libres une fois reconnus, et désormais leur vie n'est plus vide de sens. Ils ont un combat qui les affermit, ils se découvrent de nouvelles ressources intellectuelles, de nouvelles forces vives.

Ça a l'air chouette. C'est comme la foi, un truc que j'envie un peu sans le comprendre.

♫ Undercover Slut - Evil Star Virus

On pourrait croire que je n'en ai pas, des convictions. Si j'en avais, je me battrais bec et ongles pour les défendre, hein ?
Ben non.
J'ai toujours écouté tout ce qu'on m'a dit. Pendant de longues années, j'ai été trop fière et furieuse pour entendre. Mais plus le temps passe, plus j'entends. J'entends des gens. Des individus. Des parcours, des logiques internes, qui ne se prêtent pas à la réduction, à la généralisation et encore moins au jugement. Évidemment, je déteste toujours des gens : mes voisins, certain(e)s de mes élèves (eh oui). Le plus souvent, c'est un sentiment qui ne perdure pas au-delà de la rencontre. Dès que je commence à parler aux gens, ou plutôt à les écouter parler, c'est l'empathie qui prend le dessus.


J'ai lu ça : "décidément, le monde des hommes ne me manquera pas."*
"Le monde des hommes". Ça va être dur de convaincre les gens que les féministes engagées ne sont ni castratrices ni... lesbiennes ?!... après ça.
Le monde des hommes.
Tu veux dire, celui des machos avec qui t'es sortie pendant des années, histoire d'assurer leur légitimité, pendant que dehors, des tas de gentils malingres à lunettes potassaient leur philo sans espoir de trouver un jour une gonzesse, faute de coller au cliché de la virilité ?

Je caricature exprès, évidemment. Parfois j'ai l'impression qu'il faut répondre aux excès par l'excès. J'ai envie de rendre hommage à Alan, Franck, Mathias, Fred et mon paternel. À Malo, Louis, Mathéo, Antoine, André, Nino et tous ceux de mes élèves que j'oublie, qui sont gentils, attentionnés, intellos, maigrelets ou grassouillets, artistes, littéraires, gays, autistes, haut-potentiel. À des garçons, des hommes, qui grâce à ce genre de discours, ne vont pas avoir moins de mal qu'avant à trouver leur place, alors qu'on est au putain de 21e siècle, et qu'on leur sert toujours un discours selon lequel ils ne sont pas des hommes.

La lutte pour l'égalité ne devrait JAMAIS utiliser les raccourcis des débiles contre qui on lutte.

C'est pas parce que je suis paresseuse que je ne milite pas. C'est parce que j'y crois pas. Les militants ne se battent jamais pour quelque chose, quoi qu'ils en disent. Ils se battent contre. Et, "accessoirement", ils ne se battent que pour eux-mêmes (par eux-mêmes, j'entends ceux à qui ils pensent appartenir.) Notre époque, c'est la foire à la "manif pour moi". Je me bats pour mes privilèges, mes convictions, mon statut, ma vision.
J'ai décidé que déjà, ce serait pas mal d'être moi sans entraves. J'ai aucune légitimité à l'imposer autour de moi, même si je suis persuadée d'avoir raison.

Dans mon monde, il n'y aurait pas de genre préétabli, déjà. Ça me gonfle au dernier degré. Je suis une femme, et même frangine a fini par me faire douter, à me rappeler tout ce qu'on était censées être.
Les gens ne vivraient pas dans des pavillons infâmes avec des pelouses bien tondues mais dans de belles maisons avec des "pelouses" de fleurs sauvages. Ils feraient absolument ce qu'ils veulent de leur déco, de leur cul, de leur vie, ... Ce serait le règne de la Volte.


Je serai moi et c'est déjà pas mal. La plupart des gens qui ouvrent leur gueule blâment le système - les autres, donc - sans avoir jamais essayé d'être autre chose. Quand ils essaient, il faudrait que le monde entier soit au courant qu'ils sont devenus intelligents.

Rencontrez des gens. Parlez-leur, au lieu de leur brailler votre hargne, vous êtes adultes, merde. (je te parle pas à toi, hein). Vous vous plaignez d'en avoir ras-le-bol de faire de la pédagogie. C'est parce que vous n'avez rien entendu. Si vous écoutiez Marley parler de son père absent ou Enzo de celui qui battait sa mère, vous comprendriez peut-être sur quelles failles et certitudes se construisent les enfants, des gens en devenir, vous savez, et peut-être que vous n'en auriez plus marre d'être pédagogues. Maintenant, si vous croyez que le combat passe par Twitter, évidemment, vous êtes foutus.

Oui, il faut des lois. Y'a des abrutis dehors qu'on n'aura qu'à force de sanctions. Pour que la société change, il faut museler les cons. Maintenant, si vous faisiez de la pédagogie à destination des gens prêts à la recevoir, plutôt que de foncer dans des murs, vous seriez peut-être moins désespérés.

Et j'dis ça comme si j'avais la science infuse. C'est pas le cas. Mais c'est pour ça que je dis "commençons par être ce que nous voulons être". Si on était tous ce qu'on voulait être, la société aurait pas la même gueule.

J'suis une privilégiée, je le sais. Mais ça reste un peu facile de me dire que tout ce que j'ai fait, je l'ai fait parce que j'avais le choix. Je parle pas de moyens financiers. Je parle d'être soi. Et ça, tout le monde peut le faire. Tu peux être cantinière et ne pas vouloir de gosses. Tu peux être éboueur et scientifique. Tu peux être catho et sortir avec autre chose qu'un technocrate macho. Tu peux danser en boîte et pas rentrer avec le dragueur à deux balles sous prétexte qu'il avait les yeux verts. Tu peux venir du 93 et avoir envie d'être bibliothécaire.

C'est vrai que je viens d'une famille qui m'a laissé le choix. En même temps, mon père m'a aussi fait comprendre qu'il avait un problème avec les gays et qu'il pensait que je "valais mieux" que caissière. Il m'a laissée faire, certes.

C'est l'éternel dilemme de La zone du dehors : "Tout est question d’éducation."
Mais alors, deux possibilités :
- c'est une question d'éducation : tu ne peux pas en vouloir aux gens d'être qui ils sont
- c'en est pas une. Tu peux leur en vouloir, mais pourquoi toi t'es tombé dans le panneau ?


* je ne cite pas ma source car mon but n'est pas d'agresser qui que ce soit. Je la donnerai en privé si ça vous intéresse, mais c'est quelqu'un que je respecte.

Les histoires

Mardi 5 novembre 2019, 23h35
Playlist "en boucle" de Spotify

Je savais que j'aurais pas envie de me lever et je savais que les mots reviendraient. Je savais qu'ils viendraient à la rescousse : les ados, leurs maux, la musique que tu savoures parce que t'as pas le choix, la bière qui coule à flot parce que t'as plus le choix non plus, les aubes barrées d'orage, les trombes d'eaux sous lesquelles tu cours, les citations que tu gardes dans la cage thoracique pour les ressortir auxdits ados parce que tu sais que trois d'entre eux vont résonner, les nuits mouvementées, la fumée, le chat qui respire si fort.

J'étais assise en tailleur dans un couloir et j'essayais d'être l'adulte que je voulais devenir en commençant ce métier : je m'efforçais d'être encourageante et surtout pas conne en face d'une ado désemparée, en pleurs, qui mettait des mots loin d'être subjectifs sur son mal-être.
J'aimais être là, non pas parce que j'espérais enfin en trouver un qui aille mal, mais parce que j'espérais enfin pouvoir être utile à un de ceux qui allaient mal.

Je voulais lui dire que je me souvenais que mes propres profs m'avaient dit "oh, ça va, c'est des histoires de gamines, grandis un peu !" Alors que ces histoires, c'était toute ma vie, c'était tout ce qui comptait. J'ai reconnu mes hurlements silencieux, sauf qu'elle avait les mots pour les dire, sauf qu'elle avait confiance. Je pouvais pas me rater.

Je me suis sûrement ratée. Quand je lui ai proposé des moyens de se défendre, avec mes maladresses. Quand j'ai topé Audrey pour tenter de lui expliquer comment interagir avec sa copine malheureuse. Quand je n'ai plus su, comme souvent, déterminer la frontière entre prof et humain.

Alors, comme à chaque fois, c'est revenu. J'ai écrit mes failles. Je suis certaine que qui ne me connaît pas y verra les défauts d'un personnage pas trop mal écrit. Ceux qui me connaissent bien reconnaîtront mes propres tares. C'est ce qui rend la fiction si difficile à faire lire. C'est bien plus personnel qu'un blog.


Je suis sûre d'avoir écrit un billet fort ressemblant à celui-ci, une autre rentrée. C'est pour ça que je sais que mes efforts sont vains :
je ne vais pas arrêter de boire
je ne vais pas me coucher à une heure décente après avoir bossé toute la soirée
Je ne vais pas cesser d'exploser puis de m'éteindre - et vice-versa.

Je vais trouver la matière de mes textes chaque jour passé au taf, et je vais m'efforcer de ne trahir personne chaque fois que ça exsudera trop pour que je n'ai d'autre choix que de l'encrer.
Je vais m'entourer d'un écran de fumée tous les soirs si je peux y projeter le théâtre de mes journées.
Je vais écouter de la musique trop fort pour convoquer les émotions et me les rejouer en boucle, parce que c'est ce qui me fait vivre.
Je vais continuer de picoler pour que leurs voix ne deviennent pas insoutenables.

La Volte

Jeudi 24 octobre 2019, 20h00
Radio Blooböxx

Ce que j'ai vécu ces deux jours et demis, il me faudra un peu de temps pour en extirper quelques éclats de miroir, à replanter dans ma chair à bon escient. Je me suis couchée mardi soir en ayant hâte que la nuit passe, car j'allais pouvoir reprendre mon livre. Je m'en suis arrachée avec agacement pour me livrer à d'inévitables corvées, et j'ai râlé plus que de raison contre tout ce qui me retardait. Je me suis rendu compte que si Mathias n'avait pas été là, je ne me serais pas fait à manger ; je me suis rencognée dans mon canapé entre deux touillages d'oignon. Il me restait vingt... dix... cinq pages... Et quand Mathias est rentré, j'ai dit : "il me reste deux paragraphes, pardon", et ça a dû être assez désagréable que je ne tourne même pas la tête. Mais j'avais cessé plusieurs fois de respirer, pleuré aussi souvent, et annoté mon carnet de mots - éclairs, soleils, abysses - et de remarques personnelles qui jamais ne rendraient justice à ce que j'étais en train de vivre, à la crispation dans mon ventre et à la beauté qui hurlait dans mes veines, alors non, je ne pouvais pas lever le nez de ces deux derniers paragraphes pour simplement dire bonjour.

O Captain ! My Captain ! our fearful trip is done ;
The ship has weather'd every rack, the prize we sought is won.
Walt Whitman

"Vibre et fais vibrer"

Samedi 19 octobre 2019, 23h51
♫ Agonoize...

Au mois de mai dernier, j'ai écrit à monsieur Lekieffre. Il m'a répondu dans la foulée, puis j'ai laissé passer le temps, comme toujours. Hier soir, je lui envoyais un nouveau message, et je trouvais sa réponse ce matin dans ma boîte mail.

Il y a deux ans, j'ai contacté deux de mes anciennes profs de français, que j'ai aimées de tout mon cœur et à qui je dois de faire étudier Le Cid en quatrième et de lire Zola. Leurs réponses étaient enthousiastes, mais toujours professorales.

Monsieur Lekieffre, c'était mon prof de musique de la cinquième à la troisième, si je ne m'abuse. C'était un type effrayant, virtuose et peut-être aigri. Je le lui ai dit.
Je lui écris des mails lyriques, d'une honnêteté qui me désarme moi-même. Il me répond avec une passion un peu maladroite, citant pèle-mêle Charlie Hebdo, qu'il désapprouve, les Gilets Jaunes et César. J'ai passé plusieurs heures à composer les phrases que je lui ai adressées. En lisant sa réponse ce matin, je me suis sentie comme le jeune poète face à Rilke. Monsieur Lekieffre ne joue pas les professeurs, quand il m'écrit. Il me répond. Je ne sais pas si l'italique rend bien hommage à sa démarche. Répondre, c'est tout une affaire. Il ne s'agit pas d'analyser ce que dit autrui puis de formuler sa propre opinion. Il s'agit de rebondir, ou de s'enchevêtrer dans les propos qui nous ont été adressés. Monsieur Lekieffre ne reprend pas chacune de mes phrases. Il n'offre pas un contrepoint à mes réflexions. Il a compris - pris avec lui - chacun de mes mots. Il y fait écho, avec ses mots à lui, ses mélodies bancales de non littéraire. Notre correspondance m'enthousiasme et m'apaise. J'ai l'impression de parler à un égal qui me comprend et me complète de son expérience.

Il m'a demandé qui j'étais, maintenant. Ce que je faisais de mes journées, si j'avais des enfants. Il n'a pas conservé cette distance didactique qu'ont choisie mes profs de français.

Monsieur Lekieffre m'a dit : "sois toi-même et montre-leur ta passion avec vérité et surtout sans artifice."

Je réfléchis souvent au fait qu'on (enfin, moi) n'écoute que ceux avec qui on est déjà d'accord. Mais je pense aussi beaucoup à Charles Aznavour dans Quotidien, qui disait qu'on ne devrait prendre conseil qu'auprès des gens qu'on admire. Et je pense que c'est vrai. Si monsieur Lekieffre m'avait dit que je me fourvoyais, je l'aurais écouté, parce que je le respecte.

Monsieur Lekieffre cultive son jardin, tire à l'arc et reçoit ses petits enfants. Et compose, bien entendu. J'ai envie d'être à la hauteur de sa bienveillance à mon égard, et d'avoir une vision claire de mon environnement, sans pour autant me perdre dans les méandres de la colère qu'il m'inspire. Après tout, lorsque Muriel et moi évoquions encore une fois la mort qui frappe indifféremment (je venais d'apprendre le décès d'une élève que j'avais l'année dernière), elle m'a amenée à me souvenir de ceci : à quoi bon ? Pour ça : pour la musique, pour la beauté des crépuscules, et pour les mots prononcés il y a un siècle.

Ad lib

Mardi 15 octobre 2019, 20h53
♫ Agonoize - Blutgruppe Jesus (-)

Donc, depuis hier soir, je ne fais qu'écouter cette chanson. J'ai même activé la connexion de données ce midi sur mon téléphone, pour pouvoir l'écouter en boucle en bouquinant dans la voiture. Je me lancerais bien dans une longue réflexion pour découvrir ce que révèlent mes épisodes maniaques (non.) En fait, je vais me contenter de m'émerveiller que, régulièrement, paraisse une œuvre d'art qui corresponde si parfaitement à ce que j'aime et crave d'entendre/voir.

Agonoize, que je connais pourtant relativement bien, vient de réveiller l'enthousiasme que j'éprouve en entendant Delirio Asesino, en version joyeuse. Ce morceau me fait sourire et me fait danser. Il me fait rêver ; j'imagine M. et M. l'interpréter sur scène, j'ai les ovaires qui frétillent. Du coup, j'aimerais bien écrire à propos de Nath et Anders et de Ghost et Steve, deux couples qui me donnent chaud, eux aussi (parenthèse (c'est con d'annoncer une parenthèse quand tu as tapé le signe correspondant sur le clavier, mais bon) : j'aimerais bien avoir en tête un couple hétéro qui me fasse bander. Je me demande souvent si le fait qu'il n'y en ait pas prouve que je suis moi-même hétéro, mais je ne pense pas : c'est juste que je connais aucun couple hétéro bandant, c'est tout. Les femmes en fiction ne sont pas forcément très intéressantes, et encore moins quand elles sont en couple regular.)*

* Je me relis et je me dis : mais putain !! Quand est-ce que toi, tu écris un personnage féminin bandant ?? 

Du coup, je me suis dit : quitte à écouter la même chanson en boucle pour la 150e fois en deux jours, et quitte à ne rien écrire, je peux écrire un billet sur Paradize, qui est là précisément pour ça. Et histoire de voir si j'arrive à décrocher de celle-là, je me propose d'établir un palmarès des dix chansons que j'ai écoutées des centaines de fois (d'affilée) (mais "n°1" ne voudra pas dire que c'est celle que j'ai le plus écoutée - c'est juste pour compter) (et je m'avance vachement en décidant "dix" sans avoir même commencé à réfléchir.)

1. La première qui me vienne à l'esprit, c'est celle-ci :

VNV Nation - Saviour. Très exactement à partir de 2min53.

Il m'arrive assez souvent de passer en accéléré le début d'un morceau pour arriver au moment que je préfère.

2. Darkflight - Under the shadow of fear

Ce grondement à 2min34...

3. Dans la même veine :

Summoning - Over old hills. Cette voix, mon dieu, cette voix. Et la... corne ? le didgeridoo ?
J'ai écouté ce titre pendant des heures, pour écrire le passage (perdu !!) d'Endraël dans mon premier roman.

(ou bien Land of the dead)

4. Obviously :

Vivaldi - L'été. La soliste, c'est Mari Silje Samuelsen. À partir du presto à 1min32.

5. AC/DC - Hell's bells

Mais seulement jusqu'à ce que le glas cesse de sonner.

6. Windir - Todeswalzer

Jusqu'à 2min54, puis la fin (le chant clair m'agace.) Sinon, à partir de 4min38, Journey to the end, un des trucs les plus planants ever.

Vous saviez que Listenonrepeat avait trouvé un moyen d'aller plus loin que Youtube ? Vous pouvez sélectionner la partie de la chanson que vous voulez passer en boucle. Ces gens sont des génies.

7. Amduscia - Fucking Flesh (Raw Mix)

 3min16, mon dieu.

8. Blutengel - I will follow


J'ai écouté beaucoup d'autres chansons de Blutengel en boucle ^^

 9. Hocico - Dog eat dog (doggy style remix by Solitary Experiments)

 Oui, le remix. En boucle, partout, tout le temps, à Québec.

10. À Québec toujours

Asphyxia - Concupiscentia.

Ouais, en fait, je peux faire plus de dix. Vu le nombre de fois que j'ai écouté ces morceaux (d'affilée, je rappelle), je peux affirmer que je ne me renouvelle pas beaucoup, question musique. Bon, en même temps, je suis pas jeune :D

11. La. Honte.

Gigi d'Agostino - Gigi's Time. Même le titre est pourrave.
MAIS...
Non mais rien, en fait. J'ai écouté ça des soirées et des soirées de suite, en écrivant, et j'AI PAS À ME JUSTIFIER, D'ACCORD ? :D

12. Two Steps from Hell - Unbreakable

Première rencontre avec un groupe qui s'avère répétitif, mais n'empêche. Des centaines de fois, j'vous jure.

13. Steve Jablonski - Transformers - Scorponok

Et cette fois j'ai volontairement commencé la vidéo là où c'était parfait. Le début ne m'intéresse pas. Seulement de là à 3min20. D'où l'intérêt de Listenonrepeat.

14. Soman - Hard Floor

Surtout dès 2min17, évidemment. Mu, je te conseille très vivement.

15. Ennio Morricone - The Big Gundown

Vous n'imaginez pas le temps que je viens de passer à retrouver le titre. Attention, à partir de 1min21, ça donne envie de conduire très vite.

Et sinon : les 30 premières secondes de To hell and back de Sabaton


Comment enjailler un lundi soir où t'étais crevée, à l'origine

Lundi 14 octobre 2019, 21h15
♫ Agonoize - Blutgruppe Jesus (-) - Absolution

Ce soir, j'avais bien envie d'écrire, et je n'ai bu que deux bières et demie. Finalement, je me retrouve à écouter en boucle la même chanson depuis deux heures, qui est trop jouissive pour écrire, parce que j'ai pas de chapitre funky sous le coude, et je me réfrène pour continuer de boire leeeeeentement.


Je ne vous enjoins pas à regarder le clip "self-made" parce que comme tout ce que fait Agonoize, c'est cheap. Ce serait à écouter de préférence sur Spotify, avec le son très fort. Moi, ça va me faire les prochains jours, voire les prochaines semaines, parce que y'a tout là-dedans pour me faire tripper : une voix dark et une mélodie qui donne envie de se dandiner en tapant des pieds très fort !

En retard, je suis en retard !

Vendredi 11 octobre 2019, 23h17
♫ Playlist "En boucle"

Vous connaissez ce moment où la musique monte en vous, où les chuchotis se font plus bruyants ? Vous ne pouvez pas encore déchiffrer les mots, mais ça enfle. Il faudra peut-être la soirée, et peut-être que ça ne donnera rien, et peut-être même que demain, vous dormirez comme moi, pour oublier les mots qui n'ont pas été écrits.

Il n'y a rien de pire que des mots non écrits, parce que le "ça se débloquera plus tard", ce n'est pas vrai. Les mots qui coincent, ceux qui restent au fond de la gorge, ils y dépérissent, la plupart du temps.

Les mots disent toujours la vérité, mais avec un temps de retard. Et "un temps", dans une vie, c'est long ! Ce que je ne sais dire maintenant, je pourrai le transcrire dans quelques années. Ce que j'essaie de dire maintenant, c'est ce que je ne savais pas il y a trois mois. Pas étonnant que je n'aie pas encore trouvé les mots. Mais la frustration reste la même. Et j'ai peur que ce qui n'est dit ne soit tu, parce qu'après, c'est trop tard. C'est déjà plus pareil, et oui, c'est grave ! Comment être juste quand on est toujours trop tard ?

S'amuïr

Dimanche 15 septembre 2019, 23h07
♫ Sotiria - Nacht voll Schaten

Souvent de bons prétextes pour rendre les pensées muettes, ces derniers temps. J'attends demain soir.

Soutenance à 14h. J'ai eu beau me répéter que l'enjeu était mineur, il ne l'est pas, et j'ai pas été aussi stressée depuis ma première rentrée (bon, la deuxième, plutôt. La première était infernale.) Je me répète maintenant que je suis stressée, que je le reconnais, mais qu'on va pas en faire une maladie. J'ai quand même hâte que ce soit fini, et me refuse à écouter Zack Hemsey.

Je me demande un peu, quand même, quand est-ce que je vais cesser de trouver des prétextes pour cesser de m'écouter (le prétexte d'aujourd'hui, il tient vraiment la route, c'est ça qui est casse-gueule.)

J'ai rien écrit, cette année. J'ai rien écrit, parce qu'il vaut mieux diluer les pensées en jouant à Civi, et donc se coucher à une heure décente, que de contrecarrer l'équilibre, picoler et écrire jusqu'à trois heures du mat'. Ouais, y'a pas vraiment d'équilibre, en fait. Si je me laisse être moi, ça déborde toujours, et du coup je peux pas vivre.

L'hyperbole, c'est même pas ma figure de style préférée, c'est un art de vivre, en fait. Et plus le temps passe, et moins je suis capable de nuance. C'est triste, un peu, enfin, j'imagine. J'aurais préféré, non, cru, que ce serait l'inverse. Je sais pas ce que j'aimerais.

Ma figure de style préférée, c'est la plus commune de toutes : la métaphore. Mon premier mémoire ne parlait que de ça (enfin, il aurait dû, mais on m'a pas laissée le terminer.) C'est une obsession, la métaphore, c'est ce qui m'a empêchée d'être rigoureuse dans ce mémoire-ci. On me demande des appuis scientifiques et puis des analyses, alors que moi je ne raisonne (résonne ?) que par métaphores. C'est pour ça que la Camera Obscura du Fossoyeur m'a autant touchée.

Ces derniers temps, je vis dans une métaphore. Je ne suis que marées montantes, crépuscules et pleines lunes. J'écoute les infos d'une oreille distraite, mais j'ai bien réussi ma transition vers le bonheur : j'entends plus vraiment, et heureusement. Le reste du temps, je suis soit devant mes élèves (ou mes collègues, d'ailleurs), soit dans ma tête. J'y ai rejoué plein de drames, mais je les ai pas écrits. Je me renferme.
(mais pas devant Mathias, à qui je dis, d'un débit trop rapide et un poil hystérique, ce que je ressens.)

En fait, c'est pas tout à fait exact : j'ai écrit quelques pages, pour ma fic DA2. C'est juste que... Je suis en passe de basculer derrière le rideau. La question qui se pose est : serais-je capable de les rendre publiques ? Chaque chapitre de cette fic a été une pierre ajoutée à un édifice qui devrait finir par me ressembler, et je sais pas si je suis prête à ce que ça se voie. Du coup, j'ai juste tendance à rien écrire : c'est plus simple.

C'est drôle, hein, de la part de la meuf qui se répand sur trois blogs différents ? Comme quoi, on peut donner l'impression de tout dire, et ne faire qu'effleurer la surface. C'est facile, de dire ci ou ça. C'est vachement plus dur de le dire exactement, et de le faire à voix haute. J'ai l'impression que Mu a réussi, quand elle a écrit Wanderlust (du moins le passage qui me hante, j'ai arrêté, depuis.) Ça me pose deux questions, assez pourraves :
1. Ai-je compris comme je me targue de l'avoir fait ?
2. Ferais-je aussi bien ?
La seconde question m'obnubile bien plus que la première, parce que quitte à écrire quelque chose de vrai, autant que ça soit... exact. (et beau, faut que ça soit beau, putain, sinon c'est se livrer en pâture sans le moindre souci esthétique, et c'est pas pour ça que j'écris.)
En gros : et si tout ce que je dis de moi par le biais de personnages sonne creux et banal ?
Et si tout ce que j'étais était creux et banal ?

Thanatophobie - 2. Et enthousiasme.

(loin d'être incompatibles, les deux sont plutôt complémentaires.)

Mercredi 11 septembre 2019, 21h56
♫ Gigi d'Agostino - Gigi's Time

Quand je mourrai, si vous êtes encore là, j'aimerais que vous tiriez un feu d'artifices (vous prendrez les sous sur mes fonds, évidemment). Pas parce que vous serez trop heureux de célébrer mon trépas ni parce que je suis mégalo, mais parce que c'est une des choses qui m'auront fait le plus vibrer de mon vivant. J'aurai pleuré, j'aurai crié de joie, je me serai sentie incroyablement vivante, chaque fois que j'aurai assisté à un feu d'artifice, même en vidéo. J'aimerais crever dans une extase semblable, quand bien même c'est fort peu probable.

Je suis quelque peu obsédée par la mort, depuis celle de maman, et je m'en excuse puisque vous me lisez.

En musique, il faudra que vous choisissiez entre la transe kitch de d'Agostino que j'écoute en ce moment ou un VNV ou un Two Steps from Hell. À moins que ce ne soit Hell's Bells ou  Highway to hell.

(c'est assez bête de laisser des indications sur la manière dont il faudrait nous enterrer, vu qu'on ne sera plus là ; j'en ai conscience.)

J'ai pas encore décidé si je voulais être enterrée ou incinérée. L'enterrement implique les vers, et ça doit être le truc qui me dégoûte le plus au monde (l'autre jour il y en avait dans ma poubelle, j'ai balancé compulsivement de l'essence de lavande dans l'espoir de les éradiquer, mais genre, qu'ils disparaissent purement et simplement.) Mais l'incinération, ça veut dire cesser d'être là. Apparemment, j'ai lu et vu trop de fictions fantastiques, je me suis persuadée qu'il fallait un corps, même dévoré. Je crois que même si vous récupérez les cendres, j'aurai disparu, alors que si vous m'enterrez, je pourrai demeurer dans les parages. (en vrai, je crois rien de tout ça, mais y'a un bug dans mon cerveau entre deux paramètres contradictoires : rationalité versus désir profond d'abolir la mort.)

Du coup, je continue, comme à mon habitude, d'adresser des pieds de nez à ma terreur en la provoquant : en roulant vite, en buvant trop et en ignorant mes douleurs. (rien à voir avec la phlébite, t'inquiète.)

Une partie de moi est persuadée que c'est tellement absurde de mourir, que je serai là quelque part à assister au feu d'artifice, et que ce sera juste comme quand j'étais vivante : un truc fou, un truc qu'il me faudra des années à appréhender, mais néanmoins un truc que je pourrai assimiler et sur lequel créer de nouvelles fondations.

Je pensais à la mort inéluctable de mes beaux-parents (pas qu'ils soient malades, juste qu'ils vieillissent) et j'essayais de concevoir ce que ça fait, de rentrer chez soi après avoir enterré son conjoint. Ça me semble inimaginable. Je devrais arrêter de penser à ce genre de trucs, mais je vieillis, et j'ai compris que j'allais devoir y réfléchir. Que ça allait arriver de plus en plus souvent. Je suis pas vieille, moi, mais des gens n'arrêtent pas de décéder de cancers ou autres saloperies à à peine trente ans.

C'est pour ça que je bois : pour oublier ma terreur adolescente de l'endormissement, parce que s'endormir, c'est comme mourir, en fait. C'est juste qu'on est à peu près persuadés qu'on va se réveiller. Du coup, si je suis ivre, j'y pense pas. Quand j'avais 17 ans et que je ne buvais pas, je ne m'endormais que terrassée par la fatigue.

Je m'étais promis que j'arrêterais de picoler à la rentrée. J'étais persuadée que je le ferais, parce que je me souviens fort bien de ce que c'est de se coucher sobre, et de la sérénité que j'avais ressentie à me lover sur le matelas et à rêver les yeux ouverts. Ce blog est quasiment devenu le reflet d'une déchéance. Je sais que vous y pensez en me lisant : elle sombre. Et la magie du truc, c'est que je continue de penser que tout va bien. Et le fait est que je vais bien. Je vous épargnerai la liste des preuves, qui ne fera que contredire mon propos : se justifier, c'est démontrer qu'on sait qu'il y a un problème et qu'on veut le taire.
L'alcoolisme, c'est un peu le nouveau nom d'Angoisse : c'est sa mutation. (je pense à la gosse qui est morte d'une overdose de... codéine ? Sa mère en a tiré un livre. Je suppose qu'elle aussi pensait "je vais bien, tout va bien", mais je le pense tout de même sincèrement.)

J'ai l'impression d'avoir plein d'occasions de créer des ouvertures. J'ai trouvé, cette année, l'équilibre parfait entre boulot et moi-même. Les heures creuses entre deux cours me permettent de respirer et je me sens incroyablement vivante. La mer m'appelle au bout de la rue. Je bois des cafés en préparant ma soutenance. Je respire. À la rentrée, Béatrice tombait des nues en apprenant que j'étais une personne anxieuse. J'étais tellement contente. D'avoir réussi à ne pas devenir cette fille aigrie sur le visage de laquelle ça se voit, qu'elle a encore vécu un truc pas cool, alors qu'on traverse tous des trucs pas cools. Je veux pas être la meuf qui oublie que machine aussi, elle a eu un été de merde. Je veux qu'on puisse en parler, mais pas qu'on transmette notre mauvaise humeur. Si c'est tout ce que t'as à communiquer aux gens autour de toi, mais rentre chez toi ! Je déteste les égocentrés qui, à force de parler d'eux, oublient qu'autrui a peut-être juste une capacité de résilience plus grande. (ça ne se voit pas ici, mais c'est de la triche : ici, je parle toute seule.)

Et comme je suis alcoolo, mais pas déraisonnable : je m'en vais me coucher, pour avoir mes sept heures de sommeil et profiter de mon cours avec les 3e, à 8h. (troisièmes que j'aime d'amour, mais vraiment : quel pied, de faire cours à une classe pareille !)

Un espace d'expression

Samedi 7 septembre 2019, 00h05
♫ Smashing Pumpkins - 1979

"Y a-t-il un espace d’expression possible au-delà des blogs (trop peu lus/visibles) et Instagram ?"

Je viens de lire ça, en commentaire, sur le blog de Miss Blemish. J'imagine que vous serez peu surpris d'apprendre que ça m'a choquée.

Un blog est un espace d'expression. Tu ne cesses pas de t'exprimer parce que tu es peu lue. Et, sincèrement, si tu t'exprimes pour être lue, je doute que tu t'exprimes vraiment. Ce qui doit être dit est rarement agréable à entendre.

(un)broken

18 août 2019
Je n’aurais pas aimé être une personne normale. J’ai hésité à mettre des guillemets. J’ai renoncé parce que je crois qu’il existe vraiment des personnes normales, même si elles sont, ironiquement, minoritaires.
J’ai aussi pensé un instant que c’était idiot, comme remarque, parce que, comment je pourrais le savoir ? Je ne suis pas elles.
Mais, j’sais pas. Les films américains sont pleins de protagonistes déphasés qui ne rêvent que de normalité, et j’ai des collègues qui n’attendent de moi qu’une grossesse et des rêves immobiliers, alors ça doit faire sens de préciser que non, j’ai jamais eu envie de ça. J’ai même jamais eu envie d’être juste unbroken.


À vrai dire, je crois que j’ai surtout rêvé l’inverse.


19 août 2019, 19h43


La solitude c’est toujours une rencontre avec soi-même. Je me rends compte à cette occasion combien il m’est nécessaire d’être saoule pour ce faire (le Figaro m’a informée que quand on tient encore debout, on est saoul et pas ivre. D’ailleurs, on n’est ivre que si on a bu du vin, donc comme je carbure à la bière, ça ne compte pas).
Quand je suis ivre, saoule, pardon, je n’ai pas honte d’être moi. J’y prends plaisir.
Personne ne saura jamais ce que c’est que d’être moi, parce que je ne le dirai jamais. Je ne trompe personne, et surtout pas moi, en surfant sur des sites « spéciaux » sous le couvert de la navigation privée de Firefox. Je ne m’y inscrirai jamais, car je n’ai rien à y faire. Je n’y cherche que la confirmation que je ne suis pas seule. Ça n’a jamais anéanti ni la honte ni la conviction que personne que je connais ne comprendrait. Seuls ces étrangers qui partagent mes fantasmes le pourraient, et je n’ai nulle intention d’entrer en contact avec eux. Parce que j’aime ce que j’ai. Parce que j’aime l’homme avec qui je partage ma vie depuis seize putains d’années. Je mets un « putain » au milieu parce que si je croise encore une personne qui me dit que j’aurais pu vivre d’autres expériences avant de me caser, je lui montrerai cette putain de bague que j’ai obtenue d’un homme que j’avais trompé dans le seul but de voir ce que ça ferait d’être quelqu’un d’autre. Je lui cracherai à la gueule que ça n’a pas l’air de valoir grand-chose, ces foutues expériences, quand ils trompent tous leur conjoint, quand ils sont incapables de s’aimer eux-mêmes et a fortiori leur partenaire.

Je ne peux dire à personne qui je suis.
Parce que c’est sale et ridicule. Parce que c’est ce que j’ai trouvé pour sublimer les saloperies qui m’ont traumatisées. Et non, ça non plus, j’ai pas l’intention d’en guérir. J’ai honte, c’est vrai. C’est pas vraiment surprenant, vu que j’ai eu honte toute ma vie. De moi. De mes parents. De qui on était, de ce qu’on a vécu. Personne ne comprendra jamais parce que toutes les explications du monde n’éclairciront jamais la bizarrerie, la dégueulasserie de ce que je suis. Parce que c’est pas réductible. Je les ai lues, les théories. « Traumatisme dans l’enfance, sévices sexuels ». Ça ne me décrit pas du tout, et même, eh ! si c’était le cas ! Je ne suis pas une liste de symptômes. Je ne suis pas un putain de profil.


Je suis une meuf qui ouvre une cinquième bière à 20h. Je suis une meuf qui profite des absences de son mec pour enfin se livrer à ses fantasmes les plus sordides. Je suis une meuf qui chiale en écoutant Alphaville en boucle à 20h sans avoir bouffé. Rien de tout ça n’est explicable. Quid de tous ceux qui auraient vécu la même chose que moi sans devenir comme moi ? (ouais désolée, je viens de m’enfiler la saison 2 de Mindhunter. Tous les psychopathes partagent un motif. Alors que faire de tous ceux qui les partagent également et ne sont pas devenus psychopathes ?)


Pour expliquer qui je suis, il faudrait que j’écrive une autobiographie détaillée. Pas seulement des faits, mais de chaque putain d’écharde dans mon subconscient. De ce que ça représente pour moi, de la manière dont j’ai cicatrisé autour, de la façon dont ça continue de m’influencer maintenant. Je ne me réduis pas à « j’aime ceci parce que cela me fait ressentir cela. » Ça n’explique rien du tout. Et je suis convaincue qu’il en faudrait des tonnes, d’explications, pour me faire comprendre. Et comprendre, ce n’est pas partager, loin de là. Alors je reste seule avec mes délires honteux, ceux que je ne partage qu’avec les gens qui vivent dans ma tête.


Et puis je sais bien qu’il existe une frontière entre les fantasmes et leur réalisation. Je vis très bien la réalisation des miens, du moment que je suis seule. Je n’ai pas la moindre idée de ce à quoi ça ressemblerait si je n’étais pas seule. Selon toute probabilité, je serais encore plus dégoûtée que je ne le suis présentement.


L’année dernière, j’ai noirci une page blanche et je l’ai supprimée le lendemain. C’était une catharsis, une explosion. À la lumière du jour, ça ne ressemblait à rien de plus qu’à des lignes mal écrites et carrément sordides. Certaines choses n’ont d’existence que dans les ténèbres, certaines choses doivent vraiment y rester. Est-ce qu’elles me feraient moins mal si je les exposais ? Non, car je ne veux rien d’autre que d’être broken.


Je n’admire pas les gens lumineux et stables. Peut-être que ce n’est qu’une apparence qu’ils se donnent, mais ça ne change rien ! Pourquoi font-il ça ? Parce que leur optimisme ne peut s’entacher de douleur ? Mais l’optimisme sans la conscience du malheur, c’est rien moins qu’une putain d’illusion. « Malheureusement pour vous, vouloir être intelligent ne fera jamais de vous un génie » disait Morrigan à Alistair. J’en pense autant de l’optimisme. Je suis une personne optimiste (et j’aimerais autant ne pas l’être.) C’est bien pour ça que je déteste les gens équilibrés. La vie, ça fait mal sa race ! Continuer parce qu’elle est belle aussi, je trouve ça vachement plus percutant que les discours des connards qui relèguent chaque spectre au placard. Maman est morte, et avant ça, elle m’a légué un jardin rempli de monstres. Papa va mourir (un jour, pas tout de suite, s’il te plaît.) Je vais continuer de voir décliner et mourir des gens que j’aime. Peut-être que c’est sur moi que va tomber la prochaine tuile, comme sur cette Youtubeuse de trente ans que je ne connaissais que via Mona Chollet, et qui vient de claquer d’un cancer. Nan, la vie n’est pas belle parce qu’elle est courte. Elle est belle malgré sa brièveté.


J’espère qu’un jour je pourrai assumer qui je suis sans le concours de l’alcool. Même si je ne le peux en face de personne d’autre que moi. Ne pas avoir honte à chaque putain de minute de lucidité, ce serait déjà pas mal.




21h47


Qu’est-ce qu’on a foutu, maman ? J’ai transformé tes traumas en fantasmes. J’ai élevé ta honte au premier rang. Tout ce que j’ai haï en toi (et c’était en toi, mais ça n’était pas toi), je l’ai remodelé pour en faire l’essence de mes extases. Tu m’étonnes que j’ai honte. J’aimerais mieux être le genre de personne dépourvue d’intelligence intra-personnelle, ça m’éviterait de convoquer ma mère dans mes ébats. En même temps, si j’avais pas fait ça… que se serait-il passé ? Je me serais émiettée en mille morceaux ? J’aurais rampé en gerbant jusqu’à m’être débarrassée de moi-même ?


Je ne sais pas ce que c’est que d’être une femme. J’ai toujours été absolument persuadée que j’en étais une, et ça ne m’a jamais posé de problème. Maintenant que lesdites femmes prennent les armes toutes les trente secondes pour se défendre, je me rends compte que je n’en suis pas une. Oh, je les ai entendues, les remarques machos, les sifflets dans la rue et les insultes parce que je devais être lesbienne pour refuser une si gracieuse proposition que celle-ci : « ça te dirait que je t’encule vite fait ? » (peu ou prou, hein, j’ai pas appris par cœur.)
Je les ai entendues, mais ça m’est passé au-dessus. Je ne me sens pas concernée, puisque je ne donne pas suite. Je n’ai pas épousé le gars qui fait des « blagues » sur les blondes ou les femmes au volant. J’ai été furieuse de me faire traiter de salope par une bande de racailles décérébrées à qui j’avais tourné le dos, mais je suis tout aussi furieuse de savoir qu’ils « s’insultent » de pédales. Je ne me sens pas concernée, parce que ces mecs haïssent tout ce qui ne leur ressemble pas. Pas plus moi qu’un(e) autre.


Quand j’étais plus jeune, avoir mes règles me faisait me sentir sale, dégueulasse. Ça n’a pas vraiment changé, surtout depuis que je joue à Bloody Mary une fois par mois dans ma salle de bain. Pour autant, je ne répugne pas à être une femme. Ça ne me fait pas grand-chose, pour tout dire. J’admire les trans au moins autant que les universitaires, pour une raison très simple : apparemment, iels savent très bien qui iels sont. Je ne suis rien, moi. Je suis une femme avec un vagin vide. Quand j’entends parler des cycles lunaires et de la féminité à laquelle je devrais me reconnecter, je hausse les épaules. Qu’est-ce que tu veux que ça me fasse ? Je suis juste un corps doté de lèvres et d’un vagin. Je trouve même pas ça spécialement beau, pas plus qu’une bite, autant te le dire tout de suite. J’aime tout dans le corps des gens, sauf leur sexe.
Je suis bi. Je suis une meuf bi casée avec un mec. J’ai appris récemment que même ça, ça me rendait méprisable. Que je serais au moins quelqu’un si j’avais été lesbienne. La vérité, c’est que je m’en fous. La plupart du temps, je fantasme sur les gonzesses. Je les trouve belles. Les mecs, vachement moins. Sauf les gays. Ça en dit sûrement plus long sur ma notion de la virilité que sur ma sexualité. Je suis bi et j’ai des fantasmes de régression. Apparemment, tout ce que ça dit de moi, c’est que je devrais me faire soigner. C’est ça, qui me caractérise, pas d’être une femme. Et la vérité, c’est que, oui, moi aussi, je me cherche une étiquette. Depuis des lustres. Je sais bien que tu le sais, ça fait quinze fois que j’en parle. Ce que je veux dire, c’est que j’aimerais bien ne pas en avoir besoin. Ou le contraire : tu sais, si j’avais été gay et que j’avais dû me payer les insultes qui vont avec, j’aurais su contre quoi diriger ma colère. Mais moi, je ne suis rien. Je suis une meuf bi casée avec un mec. Je suis une meuf qui a découvert vers sept-huit ans ce qui deviendrait son plaisir coupable, et quand j’ai cherché sur le web si j’étais seule, je suis tombée sur des forums remplis de gens « normaux » qui estimaient que leurs fantasmes étaient partagés, et pas les miens, et qu’eux valaient mieux que nous. Mais « nous » n’existons pas en dehors de « nos » petites communautés invisibles. « Nous » avons un nom qui n’a cours que sur le web. « Nous » n’avons pas de « fierté ». Tant mieux, tu sais. Chaque fois que j’ai espéré pouvoir dire « nous », en dehors de mon couple, je me suis ramassée. « Nous » n’étions qu’un groupe de personnes hétéroclites, chacune croyant que sa voix représentait les autres.


(J’écoute la « capsule temporelle » que m’a concocté Spotify sur la base de ma date de naissance. C’est plein de Linkin Park, Manson, 3 doors down & Papa Roach. Très bien vu, donc. Je suis un peu surprise d’y entendre les Doors : de très bon goût, mais ça me vieillit, un peu !)






Mercredi 21 août 2019, 22h34
♫ Hocico – Dog eat dog (doggy style remix by Solitary Experiments)


Plutôt ironique, le titre de ce remix. Suivant : Animality, Aktivehate. Ha.
Mal’ et moi touchions au fond, hier. Nous y étions presque. J’ai la sensation qu’il ne restait qu’un voile à lever pour enfin voir. Mais je ne suis pas sûre que je veuille voir. Je ne sais pas ce que je ferais de ce que j’aurais découvert. Parfois, je me dis que la seule question qui reste en suspens, c’est celle-ci. Vivrais-je ?
Ou franchirais-je la dernière limite ? Celle que je sais toucher du doigt chaque fois que je bois la bière de trop ?
J’aime à penser que c’est un faux débat : si j’avais voulu en finir, ce serait fait depuis longtemps. Mais ce n’est pas tout à fait vrai : si j’avais voulu vivre… ne l’aurais-je pas fait depuis longtemps ?
La vérité, je crois, c’est que j’aime être en vie. Mais être en vie, pour moi, ça ne sera jamais faire du yoga au soleil couchant. Être en vie, ce sera toujours danser sur le fil du rasoir. C’est ça que j’ai compris. Ce n’est pas une métaphore. Vivre, ce sera pleurer, prendre des coups que j’aurais cherchés, m’humilier. Je vivrai, mais dans les abysses. Il y aura toujours des ténèbres aux coins de ma tête. Je n’ai pas l’intention de les dissiper. Ce n’est pas ce que je voulais. Je n’avais pas compris que je ne souhaitais que les amadouer. Je ne veux pas gommer qui je suis. Je ne veux pas être heureuse. Je le suis !


Tu sais, Mal’, tout ce que je t’ai dit hier, j’en ai toujours honte. Ne serait-ce que parce que ça me perturbe que quelqu’un en sache autant sur moi. Mais j’ai aussi l’impression d’avoir vécu un genre d’épiphanie. Comme si tu avais confirmé le puzzle. Les pièces sont toutes en place, et je sais pourquoi. Ce que nous partageons, nous nous en serions bien passées. Mais nous avons cette chance de dingue, celle d’être connectées. Nous sommes le miroir déformé l’une de l’autre. À nous de vivre, désormais, avec le savoir de l’autre. Avec ce que son image nous apprend sur nous-mêmes. Je n’aime pas encore ce que je vois dans cette glace. Je vois un monstre. Pourtant, il me fascine. C’est la première fois que je le regarde en face. Et ce que j’aime chez lui, c’est qu’il sait qui il est. Je sais qui je suis. Il ne me reste qu’à l’enlacer. Il ne me reste qu’à regarder le miroir et dire « c’est moi. »


Je crois que cet été m’aura appris ça.
♫ Cyborg Attack – Blutrausch


vendredi 23 août 2019, 00h20


Mathias ne rentre que dimanche.


Je ne me souviens pas que c’ait été si long, l’année dernière. Faut dire qu’il était là le 22. Cette semaine n’est rien d’autre qu’une interminable descente aux Enfers. Ne pas écrire une ligne de fiction, ne pas bosser, passer mes journées devant Netflix, sans discontinuer, et boire dès que 18h seront passées – un mantra, 18h. Dans How I met, ils disent que rien de bon ne peut arriver après deux heures du mat’, je crois. Ma conviction est que rien de bon ne peut arriver avant 18h. C’est mon garde-fou.
Je sais pas si j’ai déjà été dans un tel état de déréliction intellectuelle, à part la semaine qui a suivi le 22 août 2017.
J’avais jamais sauté un repas de ma vie.


Je suis à deux doigts de démonter le rasoir dont la lame me permettra de ressentir n’importe quoi. Tout, plutôt que ça. J’ai l’impression d’être en prison. Je voudrais hurler, mais je n’ai plus de voix. Je voudrais écrire, mais les mots sont taris. Je suis piégée dans mon cauchemar, et je l’ai voulu ! Je savais avant que Mathias parte que cette semaine serait celle où je plongerais. Je voulais savoir ce que ça ferait. Maintenant, je sais. Ça fait putain de mal. J’ai l’impression d’avoir dix-sept ans à nouveau. Rien à dire, mais du sang à faire gicler. N’importe quoi, pourvu que la Dévoreuse s’en aille.


J’ai menti, d’accord ! Si ce que je suis, c’est un corps brisé greffé à un visage muet, alors non, je ne pourrai jamais l’enlacer. J’espérais vraiment un déclic. J’espérais que la bouche d’ombre s’ouvrirait, que je serais enfin capable de mettre en mots les mélodies malades qui me traversent. Mais j’ai la bouche cousue et les yeux clos. Charon n’en finit pas de me trimballer à travers le Styx. Et je me suis étranglée avec la gorgée prélevée aux eaux du Léthé, de toute évidence, parce que quand j’ai vu la photo que Suzanne gardait de maman, je me suis aperçue que j’avais commencé d’effacer ses traits de ma mémoire.
Elle conserve de maman une photo de quand elle ne sortait plus de son lit. Pas une d’avant. Est-ce qu’elle est plus forte que moi ?
C’est vrai qu’elle est belle, cette photo. Maman y sourit. Suzanne l’a fait encadrer. Suzanne a connu cette femme quand elle n’était encore qu’une ado, mais c’est cette image qu’elle a conservée.


Je suis sûre de pas vouloir crever, mais je serais pas contre quelques coups et entailles, là tout de suite.


C’est une chose extrêmement bizarre à demander à une personne qu’on aime, hein. Pourtant y’a personne d’autre à qui je pourrais le faire, parce que ça nécessite une confiance absolue. Comment avoir confiance en la personne à qui on demande de nous faire mal ? Je n’en sais rien, n’en étant pas là (rassurons les pudibonds). Le fait est que la douleur, c’est comme le sexe, du moins je le crois – n’en étant pas là. C’est meilleur quand c’est pas auto-infligé.


Lundi 26 août 2019, 01h24


Mathias est rentré. Je sais bien que la prochaine étape, c’est de me regarder dans une glace en son absence. Cette semaine a été un enfer parce que je me suis permise d’être tout ce que je voulais, et que quand il est là, je me réfrène.
Bizarrement, j’ai le souvenir de l’avoir bien mieux admis l’année dernière. En même temps, c’est logique, j’imagine. L’an dernier, je franchissais la barrière pour la première fois. Cette année, ce n’était plus une transgression. C’était moi, je le savais.
Et pourtant… rien ne m’apaise plus que de faire l’idiote devant mon PC, à fredonner Angie, en sachant très bien qu’il est là, qu’il écoute Lana Del Ray dans mon dos (littéralement : nos bureaux sont chacun d’un côté de la pièce.) J’ai fait disparaître toute trace de ma semaine passée sans lui, mais j’ai jamais été si heureuse que quand je l’ai entendu se garer dans l’allée (bon, j’suis pas mécontente qu’il soit arrivé pile au moment où je finissais de lire Ready player et pas avant.)
Cette semaine a été un enfer parce qu’il était pas là. Si je classe les trucs dans deux colonnes, j’en arrive toujours au même point : il vaut mieux qu’il soit là, même si ça implique que je fasse comme si les deux-trois trucs qui m’obsèdent n’existaient pas.
Je suis putain de dépendante. Si j’avais pas de mec, ma frangine ne me supporterait plus. J’viens de passer une semaine à parler à mon chat, et la seule soirée que j’aie passée avec ma sœur, je lui ai tout balancé, comme si on allait mourir le lendemain. On était certes en mode sans retour. Quand je suis avec Mu, j’ai souvent l’impression qu’on passe un cap. Chaque conversation se répète sans jamais se ressembler. Les pièces s’assemblent. Cela dit, vu que je parle beaucoup, je ne sais pas trop ce qu’elle en pense. Je suis le genre de personne qui vit ses épiphanies à voix haute. C’est sans doute un peu encombrant.


Quand Mathias n’est pas là, je parle de lui au chat. Il incarne chaque note des slows pourraves que j’écoute depuis l’adolescence (Mathias, pas le chat.) Je sais qui il est. Il me connaît par cœur. Et tout ce qu’il ne sait pas, je finis par le lui dire, parce que j’ai confiance en lui.

A seagull

Mercredi 28 août 2019, 20h32
♫ Sia - Bird set free

Beaucoup de choses ont commencé avec Sia, pour moi. Alors j'aime qu'août se finisse là-dessus.



Clipped wings, I was a broken thing
Had a voice, had a voice but I could not sing
You would wind me down
I struggled on the ground
So lost, the line had been crossed
Had a voice, had a voice but I could not talk
You held me down
I struggle to fly now

But there's a scream inside that we all try to hide
We hold on so tight, we cannot deny
Eats us alive, oh it eats us alive
Yes, there's a scream inside that we all try to hide
We hold on so tight, but I don't wanna die, no
I don't wanna die, I don't wanna die

(Mu, la mouette, elle l'appelle "Steven Seagal"... ;P)

Was is' denn los mit dir

Lundi 26 août 2019, 02h30
♫ Nachtblut - Was is' denn los mit dir

Je dois vous avouer que cette chanson est le truc qui m'a mise le plus en joie depuis des lustres. J'ai vraiment un problème avec Nachtblut, j'en suis navrée. Je crois que j'aime ces mecs d'amour, et c'est peut-être encore plus honteux que d'aimer Blutengel.




Euh...

Mardi 23 juillet 2019, 10h38

Bon, du coup, il faut que je vous raconte : une fois c'est rigolo, deux fois, c'est... étrange ?

Donc voilà. La semaine dernière, j'ai rêvé que j'étais chez Julia, je ne sais plus ni pourquoi ni comment. En sortant, je croise son père, avec qui je discute. On s'entend bien, mieux que ce à quoi je m'attendais. Il me propose de me raccompagner chez moi car les rues ne sont pas sûres, la nuit. Je décline, car je suis une femme indépendante et sûre d'elle, je n'ai peur de rien !

Je me retrouve dans les rues du centre-ville, qui sont encore relativement animées, même s'il fait nuit. Les lampadaires sont allumés. À un moment, je suis dans un passage couvert, ça ressemble au couloir d'un immeuble d'habitation un peu luxe, et là je croise Manuel Valls. Il est plus petit qu'en vrai (enfin, il a l'air, j'ai jamais vraiment vu Manuel Valls). On discute, il me propose de dîner chez lui. Je suis pas hyper chaude parce qu'apparemment, Trump y est et Valls fait des blagues à ce propos. Là, il a d'un coup un bouquet dans les mains, et il me dit qu'on devrait aller ailleurs, à l'hôtel par exemple, et il me propose 200€ pour passer la soirée avec lui !!

Et cette nuit, j'ai rêvé que j'assistais à un repas. J'étais la seule femme au milieu des costards-cravates. À ma droite, un type a décidé d'empêcher toute conversation sérieuse en émettant des commentaires, en faisant des bruits... Je suis morte de rire. Le type à ma gauche finit par renoncer à tenir le discours sérieux et constructif qu'il essayait de faire entendre et je le charrie gentiment. Cela dit, il n'est pas vraiment fâché, on se taquine. Le type à ma gauche... C'est Nicolas Sarkozy !! On s'entendait drôlement bien !

Je ne suis pas sûre que le dico des rêves puisse m'aider, là...

Damaged

Vendredi 21 juin 2019, 23h06
♫ Hocico - Damaged

" (...) je ne me sens pas l'obligation de devenir terne et chiante juste parce que je suis entrée dans ma quatrième décennie. Rien ne me retient, rien ni personne. Je ne céderai pas. Défendre son mode de vie n'est pas si aisé, mes amis m'ont appris à le comprendre. Gardez courage, parce que ce qu'on a dans le cœur, c'est quelque chose dont la valeur n'est en aucune façon comparable aux "projets", aux pressions, aux sales cons. C'est nous. C'est notre force vitale, notre raison de vivre."

♫ Indochine - Karma Mix
C'est l'été, je le sens, je le sais, sans avoir besoin de connaître la date, sans regarder le ciel qui ne se découvre pas, sans entendre la foule avinée qui se redécouvre vivante à chaque occasion d'étaler sa magnificence en public.
Je le sais parce que mes regards se tournent vers la mer et que la mélancolie voile mes perceptions. Je le sais rien qu'à jauger la profondeur des flaques qui jalonnent ma route - je m'y noie, avec volupté.
Je le sais à cet élan qui me guide vers le rivage, à la certitude que je ne vais pas tarder à aller m'assoir au bord des flots, une bière à la main, pour converser avec maman.

Je vais m'assoir au bord du vide, une bière à la main, et discuter avec la mort.

♫ Aurora - Daydreamer

Et écouter Aurora, obviously. Ce serait parfait, clôturer deux cycles avec une seule chanson.


*

Les "jérémiades". J'ai lu ça sur un blog retrouvé que j'aime beaucoup, et évidemment, la meuf que je n'avais pas envie de recroiser y avait laissé son grain de sel.
Est-ce que je "jérémie" ? (ouais bah, j'aime bien - le mot, jveux dire.)
C'est quoi, des jérémiades ? Est-ce qu'on doit toujours ne laisser que du positif, comme seule trace de nous-mêmes ?
J'en ai déjà parlé. Je ne crois pas. Je trouve les billets positivo-moralisateurs bien plus oppressants que ceux où les gens, juste, s'expriment. Je pense que c'est cette injonction à être toujours constructif et créatif est épuisante, dangereuse et hypocrite. Je préfère mille fois un article avec lequel je ne suis pas d'accord, qui m'agace un peu, qu'un ramassis de "la vie est belle et la mienne est un perpétuel foisonnement créatif." C'est ptêtre plus agréable à relire, mais c'est pas vrai. Et de mon expérience, les Démons ne sont jamais morts d'avoir été enterrés.

Vous croyez donc que c'est si détestable que ça, pour autrui, de vous entendre "jérémier" ? Ne vous est-il jamais venu à l'idée que d'autres pourraient y découvrir qu'ils ne sont pas seuls ?

Évidemment, je ne parle pas de se noyer dans ses propres ornières. Je ne dis pas qu'il est bon de ressasser. Mais pour autant, je refuse catégoriquement de ne lire que les victoires des bons samaritains qui ont réussi à surmonter leurs épreuves.
Ça doit être le souvenir de maman, mais, je suis désolée, je refuse de considérer que seuls les vainqueurs méritent d'être remémorés. Maman n'a été ni joyeuse, ni positive, ni combattive au sens entendu par les chantres de l'intégration et du bonheur, et je ne vois pas pourquoi son désespoir aurait moins d'importance que la persévérance des survivants.

Je comprends que les auteurs de ces blogs cherchent surtout un moyen de se sortir de leur marasme intérieur, mais encore une fois, museler Angoisse ne l'a jamais fait disparaître, donc j'ai envie de dire que c'est pas parce que vous ne présentez à autrui que vos victoires, que vos fantômes vont disparaître. C'est le propre des fantômes, d'être invisibles, ça ne les empêche pas de nous hanter.

Catharsis

Mercredi 19 juin 2019, 22h24

Hier, j'étais pas mal énervée, ou anxieuse, je sais pas. Il était 16h30, j'avais déjeuné avec Catherine et Annick (Catherine est très malade) et les 4e avaient été infects avec Marielle. Bref, une journée de fin d'année à Paimpol - établissement hautement anxiogène, même sans les fins d'année.
Bah je sais que ça va pas te plaire, à moins que tu t'appelles Maloriel, mais j'ai mis ça dans la voiture, et j'ai simplement arrêté de penser. C'était... apaisant.

 

Je saurais même pas te dire depuis combien d'années je m'étais pas envoyé ça dans les oreilles, mais  c'était aussi jouissif que la première fois, dans le car qui nous ramenait du bahut. J'avais dix-sept ans. Je me souviens encore comme ça m'a soulagée de découvrir Anorexia, et de couvrir de leurs hurlements les blagues bouffonnes des animateurs d'NRJ, et les médisances débiles des collégiennes.

Nan mais ce... malström, sérieux.

Tiens, en parlant de malström, ça y est, je me refais Pirates des Caraïbes 3 avec mes 5e. Ils sont fans, et comme ils sont intelligents, ça promet des conversations intéressantes. C'est la seule raison pour laquelle j'ai hâte d'être à demain. Autrement, t'as remarqué, je suis en train d'écouter Anorexia au lieu d'envisager de me brosser les dents.

Y'avait celle-là, aussi :

 

Ce que j'adore chez Anorexia, tu t'en doutes, c'est le mélange sympho/metal.

À part ça, je suis étonnamment, incroyablement même, calme, en ce moment. Mal' m'a fait découvrir The Hu et j'ai écouté ça je ne sais combien de fois :
 
 

Eh ! C'est pas génial ? Nan ?

What is a song, if not a call to arms ?
Extrait de l'intro de Vampyr (la Mascarade !!)

Bon, j'ai cité de mémoire, hein.

J'ai médité six jours d'affilée. J'ai noté des mots-clefs dans mon carnet. Tu sais, j'adore ça, les "mots-clefs", parce que je prends l'expression au pied de la lettre : ce sont des mots qui déverrouillent des portes.

Y'a eu ça, aussi, j'imagine que c'est Mal' qui me l'a fait écouter :

 

(Mathias déteste les anneaux dans le nez, moi je la trouve bandante, cte meuf.)

Mais j'ai surtout écouté Danheim. Genre c'est ma révélation de l'année. Genre quand j'ai fait comme Mal' me l'avait conseillé et que j'ai tenté de méditer en écoutant un de leurs albums, j'ai... j'allais dire cessé d'exister, mais c'est tout le contraire, en fait. J'ai surtout vu tomber un à un tous les filtres. Il ne restait que moi et le chant. Ça fait un peu trois ans que j'essaie d'obtenir ce résultat, et il suffisait de Danheim.
 
 

C'est pas tout à fait honnête, dans le sens où j'aurais sans doute pas été prête à les recevoir y'a un an de ça, mais le fait est que Danheim provoque chez moi des épiphanies.


Elles sont d'autant bienvenues que, tu comprends, c'est la fin de l'année (scolaire, donc c'est la fin de l'année) et j'ai juste teeeeeellement plus envie, et les élèves non plus, évidemment... Comme si on était tous suspendus. Et on attend. "Heureusement" qu'il ne fait pas beau, comme disent les collègues. Ça fait dix semaines qu'on a repris les cours !

Je sais que la majeure partie de mes collègues désapprouve ce que je vais dire, mais : moi , j'aimerais beaucoup avoir moins de vacances, mais un emploi du temps différent. Consacrer mes matinées au cours, et être obligée de rester l'après-midi, pour corriger des copies, faire de l'aide aux devoirs, du soutien, que sais-je... J'en ai marre de lire Le Cid de 15h30 à 16h20. Ça ne revêt pas le moindre sens. Je voudrais avoir moins de vacances mais un rythme d'apprentissage plus... Naturel.

Allez, encore quatre jours. Trois et demis. Avec beaucoup de révisions brevet dedans, à distribuer à des élèves bizarrement tous volontaires, alors qu'ils ont rien foutu de l'année. T'as remarqué, j'ai rouvert une bière plutôt que d'aller me coucher.

 

(Ça me met assez mal à l'aise, ces clips dans lesquels l'artiste force un public à se lever et à applaudir pour accentuer le côté "hymne" de la chanson. On dirait les vidéos de l'Éducation Nationale !!)


Allez, dansons un peu :
 
 


Eh, tu rigoles, mais ça doit être le premier truc à m'avoir donné envie de remuer mes fesses. Cela dit, j'avais parlé d'Ice MC sur le Carnet, mais dans le genre, Masterboy, c'est hyper cool. Et ouais, je confesse (encore une fois, pour les lecteurs du Carnet) : je danse comme ça parce que j'ai appris à danser dans les années 90. Toute personne plus évoluée que moi, mais de mon âge, n'est pas un true.
 
 


Pour ma part, j'adorais 2 Unlimited (je me rends bien compte que j'aime toujours la batterie électronique qui fait boum-boum).

 


Et, évidemment :

 


T'as vu comme je suis passée d'Anorexia à de la vieille dance moisie ? En passant par Danheim ? Viens pas me dire que je suis bornée, après ça.

Mal', je suis pas sûre que tu puisses t'en rappeler, mais Ru Paul's drag race, en 95, ça aurait ressemblé à ça :D
 
 

Il va sans dire que j'étais complètement fascinée par ce morceau (dont je n'avais jamais vu le clip.)


D'ailleurs, puisqu'on parle de trucs qui exerçaient sur moi une fascination bizarre, ce titre m'a toujours mise mal à l'aise, sans que je sache pourquoi (j'ai conscience de parler toute seule, t'en fais pas.)
 
 

Je vois pas du tout pourquoi tu t'ennuies, d'un coup. C'est parce que je te bombarde de musique sans te/me laisser le temps de respirer ?

C'est parce que

 

J'suis un peu fatiguée. Dans tous les sens du terme. Et ouais, je vais me coucher. T'en fais pas.

Juste un peu de 
 
 

Pour la mystique. 

Dissolution

Jeudi 13 juin 2019, 21h49
♫ Danhheim - Hringrás

Très étrange plongée dans le passé, ce soir, à relire les pages de mes carnets-mosaïques de ces dernières années. J'ai parfois écrit dans l'un, parfois dans l'autre, et les dates se mélangent. Je n'ai pas la moindre idée d'à quoi correspondent certains passages.
Je suis très fatiguée. La fumée danse sur les mélopées de Danheim. J'avais toujours réservé ces musiques à l'hiver, est-ce la faute de ce mois pluvieux si elles débordent au quotidien ? Je n'ai plus trop la notion du temps, de toute façon. La nuit coule dans le jour qui coule dans le lendemain. Je crois que j'ai écrit à peu près ça, il y a quelques mois. Ça aurait curieusement dû me paralyser, mais il n'en est rien. Je dis "curieusement" parce que la fuite du temps m'a toujours terrifiée, alors même que je cherchais à redécouvrir le présent ininterrompu de mon enfance. J'en suis tout proche, je crois, à ceci près que la faux de l'Ankou est désormais suspendue au-dessus de mes jours, ce dont je n'avais pas conscience quand j'étais petite, et que je ne parviens plus à oublier. Mais Danheim et consorts calment jusqu'à l'Angoisse, jusqu'à la mélancolie, même. Ne me restent que les émotions, l'ivresse et les sensations. Je ne m'inquiète même pas de ne pas profiter. Le secondes glissent les unes dans les autres, et j'irai me coucher sans amertume à la fin de ma bière, parce que je vis, pour l'instant et depuis quelques jours, dans un présent ininterrompu qui n'admet nul accroc.

J'ai hâte, bien sûr. De savoir si je resterai à Saint Quay, de finir l'année, d'en commencer une nouvelle, de tester ma séquence sur le fantastique - que je trouve trop cool -, de boucler mon mémoire - advienne que pourra -, de tenter le concours - j'ai rien à y perdre -, de mettre le pied dans ma maison, de somnoler le matin tandis que les oiseaux chantent - par plaisir, ai-je entendu dire -, d'être en vacances, de cuisiner, d'écrire enfin les mots qui me brûlent les doigts - mais s'éteignent sur le clavier...

J'ai hâte, oui, mais ce n'est pas maintenant. Maintenant ce sont les percussions et les cordes qui grincent, maintenant c'est le crépuscule au-dessus de mon lit, et la brise qui donne envie de remonter la couette haut, sous le menton, maintenant ce sont les mots qui s'alignent : Kotsu kotsu (une marche après l'autre), silence, et le bruit des coquillages remués par les vagues.

La page blanche

Vendredi 7 juin 2019, 22h59
Further ?




Je ne sais pas du tout quoi écrire. Ce n'est pas la première fois que j'en fais le constat ; c'est toujours aussi terrifiant.
Ne pas écrire, pour moi, c'est à peu près synonyme de ne pas être. Je me fous de la qualité : j'écris parce que je pense et parce que je ressens. N'avoir rien à dire, c'est un échec - pire, un renoncement. Une négation. Comme si tout ce que j'avais vécu retournait au néant au fur et à mesure. Ne pas écrire, c'est être dénuée d'imagination, d'idées, de refuges.

Mes autres moi aussi se sont tus. Je suis toute seule face à l'écume. Une page blanche dont mêmes les ratures s'effacent en soubresauts.

Alors je ressuscite les mélodies d’antan. Celles dont j'attendais autant qu'elles m'abdiquent qu'elles me donnent envie de me relever. J'espère une étincelle.

Je ne pouvais pas me poser la question, avant : la sérénité m'a-t-elle privée de tout ce que j'étais ? Est-ce qu'elle m'a condamnée au silence ? Si c'est le cas, je prierai sans hésiter pour le retour d'Angoisse, Doute et les autres, parce que je n'aurai jamais autant l'impression de m'éteindre à petit feu que si je suis privée de mots.

Deux histoires devraient crever ma poitrine et mes doigts s'agitent dans le vide. C'est comme si après les avoir couvées, je leur avais rogné les griffes. Elles essaient de se frayer un chemin à travers moi et toutes les issues sont bouchées.

Je veux écrire. J'ouvre des documents word dont les pages blanches me narguent. Elles n'attendent rien - ce sont des pages word. Des mots sans queue ni tête ruissèlent dessus. Je ne les vois pas vraiment : il ne s'agit que d'encre virtuelle, dans tous les sens du terme - juste une image. Je veux écrire, mais rien ne vient.

*

Ce personnage, je le sais par cœur, mais dans ce contexte, toutes mes traductions tombent à côté. Ça veut sans doute dire qu'il n'y a pas sa place, mais non, je n'y crois pas. Il doit être là.
Je ne devrais même pas avoir à l'écouter, puisque je le connais. Mais c'est d'écrire un roman, dans lequel j'exprime "à voix haute" des gens dont je n'avais jamais parlé, pas vraiment, qui rend l'exercice si difficile. Je sais très bien être moi, en revanche, je n'ai jamais su me traduire.

C'est comme si avoir parlé de moi, de ce que vous savez ou devinez déjà, était moins intime que de parler des personnages que j'avais inventés. Leur donner vie, c'est me livrer en pâture, tandis que quand je parle de moi, je ne fais que souligner l'évidence.

*

01h25
♫ Enya - The Humming & Echoes in rain

C'est peut-être pour ça, en fait. Pour "faire mon deuil", j'ai verrouillé. Il fallait avancer, n'est-ce pas ? J'ai fait tout ce que j'avais espéré. J'ai oublié. Je t'ai enterrée, maman, comme je l'avais souhaité de ton vivant. Si ça se trouve, j'ai bien plus espéré que toi que ça se termine. Évidemment, je ne pensais jamais à toi en regardant la mer, avant. Ça, ça a changé. Je t'ai oubliée, mais je ne regarde plus l'océan que du coin de l’œil.

Je pourrais parler des funérailles de maman. Mais ça ne sera jamais aussi intime que le piano d'Echoes in rain. Ça ne sera jamais aussi intime que si je révélais ce que j'ai sangloté dans les bras de mes amis imaginaires. Et j'aimerais vraiment vous le dire. Mais je n'y arrive pas.

Filofobia

Vendredi 17 mai 2019, 23h52
♫ Amduscia

Je vais bientôt avoir trente-cinq ans. Cela signifie que ma sœur vient de fêter ses trente-deux. Pourtant, je n'arrive toujours pas à assimiler qu'elle est adulte.
Je m'inquiète pour elle, pour des broutilles. Je me demande sans arrêt si elle est prête à, si elle sait que.
Elle sait pourtant très bien : elle a passé trois ans seule avec les parents. Je crois que je ne m'en suis jamais remise. Je me souviens très bien n'avoir pensé qu'à ça quand je suis partie. Ensuite, j'ai oublié : c'était plus simple.

En même temps, j'ai pas tout à fait tort : elle mangerait quoi, si personne ne faisait ses courses ?

Je me demande si, quand j'aurai quatre-vingt dix balais (âge vénérable que je n'atteindrai jamais, mais soit), je parlerai encore d'elle comme de "ma petite sœur, qui a quatre-vingt-sept ans".

Je me dis souvent que ce serait vraiment plus simple si je ramenais mes angoisses à un niveau raisonnable, mais en même temps, comme je le disais dans un précédent billet, si je faisais ça, je ne servirais plus à rien.

C'que je me suis pris dans la gueule, quand mes élèves de 4e m'ont conspuée, parce que je voulais pas "céder" mon cours au profit de ma collègue de sport, qui s'en va en avance, parce qu'elle doit se faire opérer et qu'ensuite, bah elle a obtenu sa mut'.

Heureusement y'avait l'autre classe, qui ne m'a rien demandé et m'a témoigné le même respect que d'habitude.
Putain qu'il est dur, ce métier.

Bref. Parenthèse mise à part, si je ne devais me préoccuper que de moi-même, j'ai l'impression que je ferais pas de vieux os.
J'aime pas beaucoup les gens (me jetez pas la pierre, j'ai été élevée comme ça), mais j'aime les miens. Le seul problème, c'est qu'apparemment, je crois qu'ils ne peuvent pas vivre sans moi *égocentrisme inside*
Chacune de mes absences m'est sans doute plus insupportable qu'à eux.

C'est quand même con, venant de quelqu'un qui pense d'abord à préserver son cul. Je passe le plus clair de mon temps à dresser des barricades, pour être sûre qu'aucune balle ne me traverse, mais je continue de jeter un œil par-dessus, en me disant "oh mince, machin s'est pris une bastosse. C'est con que j'aie pas été là. Je m'en veux."





Comme d'hab tout s'effondre en juin, et je dois dès maintenant me faire à l'idée que l'an prochain, ce sera un autre établissement et d'autres élèves. Je les oublierai, comme je les oublie tous au fur et à mesure.
Sauf Morgane, dont le petit mot caboché trône toujours au-dessus de mon bureau, et Victoire, qui avait commandité le panneau A1 épinglé au même endroit, plein de messages gentils couturés d'erreurs d'orthographe (qu'elle avait rayées d'un trait péremptoire). Sauf Adonis que j'ai pas sauvé (j'y peux rien s'il porte un prénom pareil, hein, c'est pas moi qui l'ai inventé.)

L'hostilité dont ils sont capables de faire preuve, même ceux que t'aimes bien parce qu'ils sont gentils et courtois.
T'as beau te dire que c'est pas dirigé contre toi... C'est pire : toi, t'existes pas. Toi, malgré tous tes efforts, t'es juste la prof de français.

Je comprends les collègues usés, parce que même quand je les trouve moi-même nuls, je sais ce que ça leur a coûté de se produire sur scène. La seule différence, c'est que si j'arrive au point de me dire "j'en peux plus", je m'arrêterai. Je crois que bosser dans l'humain quand t'as plus la force, c'est la pire chose que tu puisses faire, à toi, et à eux. Et je pense que si tu nuis "à eux", alors que c'est ton taf, tu t'en rendras compte, et ce sera le début de ta descente aux enfers. Alors arrête-toi avant.

Je veux pas de fleurs (si, en fait, j'aimerais bien). Mais j'aimerais bien compter. Et oui *jalousie inside* j'aimerais bien que le prof qui enseigne la matière la plus facile ne récolte pas tous les lauriers (c'est vraiment dégueulasse, comme réflexion : pour me faire aimer le sport, il aurait vraiment fallu un excellent prof, ce que ma collègue est, de toute évidence. Elle a aussi renoncé à toute vie personnelle - mes collègues confirment -. Pour que les gens t'aiment, faut que tu te consacres uniquement à eux.)

Je les ai aimés, j'ai cru en eux, et quand je partirai, ils ne s'en rendront même pas compte. (Il est une heure, j'ai bu, laissez-moi me plaindre.)

En même temps, si j'étais pas obsédée par l'idée de plaire et celle de me rendre utile, ça irait probablement mieux.