Take me home

Dimanche 14 mai 2017
20h41
♫ Aurora – All my demons greeting me as a friend

Ceci est un essai. Je ne sais pas vraiment de quoi, encore. La tentative de figer un moment, à la manière des mes anciens écrits, et du Carnet du Quotidien Recomposé. Une espèce de mash-up. Cela ira-t-il sur le Bazzart, sur un nouveau site… ou droit dans les tréfonds du disque dur ? Je n’en sais foutrement rien. Ce que je sais par contre, c’est que je me sens incroyablement libre. Libre d’écrire n’importe quoi, en mode automatique, mais pas seulement. Disons que le titre de ce disque me semble la meilleure façon de décrire comment je me sens. De retour à la maison.

Comme un prolongement post-sismique, après le choc d’un Rendez-vous inattendu. Et j’aime énormément que cette rencontre, cette expérimentation, se fasse au son d’un album que j’écoute pour la quatrième fois, sans rien – ou presque – entre les deux, parce que cela fait des années que je n’ai pas flashé sur un album, pas comme ça, du moins. Je veux dire, il y a eu Belenos par exemple, mais Belenos est ardu, violent comme une tempête sur la mer, alors qu’Aurora est l’évidence, Aurora s’accroche à moi comme un coup de foudre : Aurora me fournit de l’électricité sur le long terme. C’est peut-être moins bien, c’est peut-être plus évident, et c’est pour ça que je suis si bien. Je ne l’avais pas vu venir, je n’en attendais rien, et c’est comme avoir été enchantée.

And I feel the light for the very first time
Not anybody knows that I am lucky to be alive

Je bois du mousseux dans un verre bleu, assise à mon bureau les poumons brûlés comme tant d’années auparavant. Sauf que. Mathias est assis derrière moi, embarqué dans son propre univers et sa propre fatigue post-week-end. Sauf que.

J’aime assez l’idée de me remettre à « bloguer » comme avant – je mets des guillemets parce que avant, je m’évertuais à faire tout sauf tenir un blog, et c’est rigolo de voir comme les définitions ont évolué, parce que maintenant, quand je blogue, c’est tout sauf spontané. C’est tout l’inverse d’avant. Je pense que je peux bien retrouver la spontanéité d’autrefois… Au fond, je n’en disais pas plus, et pourtant… Aujourd’hui chaque billet est ciselé, c’est une réflexion sur un sujet en particulier, tandis qu’à l’époque c’était le foutoir, je dévidais mes pensées au fur et à mesure… Sans pour autant me mettre en danger. J’aimais profondément les « sites perso » (c’est comme ça qu’on les appelait, à l’époque), et j’aimais partager ce quotidien avec les gens (quoique je n’aie pas publié grand-chose, ces années-là). Après, j’ai grandi, je me suis dit que ce genre de trucs n’avait probablement pas d’intérêt pour les autres. Alors que c’est précisément ce dont j’aime me souvenir, ce que j’aime partager donc, ce que j’aime lire.

Spontanées, foutoir, brouillon, mal exprimées, toutes ces réflexions que je me faisais, elles étaient justes, elles me frappent encore aujourd'hui parce que… j’avais raison ! Pas que je détienne une vérité quelconque hein, juste que je suis… toujours d’accord avec moi-même. Je crois que ça serait chouette, et intéressant, de voir ce que ça donnerait d’appliquer ce mode d’écriture à la Kalys de trente-deux balais, celle qui s’est rangée derrière son écran comme elle s’épanouissait finalement dans le quotidien si craint – si haï. C’est le seul moyen de comparer.
Avec un pseudo, oui : je me suis rarement – jamais ? – adressé la parole en m’appelant par mon prénom.

Je suis relativement épuisée : les week-ends chez les parents sont rarement moins alcoolisés que ceux que je fais chez moi. J’aime assez voir mon père ces derniers temps. Il arrive toujours à gueuler sur tout le monde et est toujours persuadé d’avoir la science infuse, mais il est quand même vachement plus serein qu’avant. On a fini la soirée, Mathias, lui et moi, sur la véranda au son des Pink Floyd en buvant de la chartreuse. Je suis pas la fille du facteur, ça au moins, c’est clair.

And I was running far away
Would I run off the world someday?
Nobody knows, nobody knows
And I was dancing in the rain
I felt alive and I can't complain
But now take me home
Take me home where I belong
I got no other place to go
Now take me home

Demain je dois me lever – comme tous les lundis, comme tout le monde. J’ai du mal à être raisonnable, le dimanche. Autant le reste de la semaine je parviens presque toujours à me coucher à 23h, autant le dimanche ressemble à une espèce de malédiction récurrente à laquelle personne  n’a envie de céder. Cette fois, je crains les 2h30 avec mes élèves, parce que c’est long, mais le poste précédent, j’avais cours quatre heures d’affilées et on faisait bien aller.
C’est trop marrant et exaltant de voir le chemin parcouru, des bancs de la fac à maintenant. De relire « mais à quoi ça mène les études d’Histoire à part l’enseignement ? Et ça, c’est hors de question » à « je me suis éclatée à prévoir une séance sur la question de l’identité pour mes 4e ! »

Aurora ne fait pas assez de bruit. Pour dépasser les bornes, il faut de la fureur.

Ou bon, juste une mélodie efficace, donc : ♫ The Crüxshadows, Deception

Je crois que je vais aller fumer une clope : m’enchaîner à ma vieille amie, alors même que je cherche à m’en débarrasser. Je ne lui laisse déjà plus que les moments sans drames, la pauvre. Même plus les angoisses quotidiennes. Je peux bien – pour l’instant – lui laisser le crépuscule.

Pray for daylight
Pray for morning
Pray for an end to our deception

Essayez. Si vous aimez la musique nulle, vous allez adorer.

Je me demande ce que sont devenues les personnes qui m’ont accompagnées toute mon adolescence. David – Doudou ? T’avais dix ans de plus que moi, envie de me tuer régulièrement (à juste titre !)… mais t’étais là. Tout du long. À me ramasser, m’engueuler, m’exhorter, m’expliquer. Requiem, le mec qui m’avait mise sur un piédestal et même qu’au fond ça me faisait plaisir. (Ce gars, il m’imaginait comme une jolie petite gothique, alors quand je l’ai rencontré, j’ai piqué une chemise à ma frangine, tellement colorée que ça en faisait mal aux yeux. Juste parce que je savais qu’il serait déstabilisé… Et que je ne lui en plairais que plus. Même les ados savent manipuler.) Étienne, dont j’ai aimé qu’il sache combien il m’avait déplu, juste pour qu’il cesse de me trouver inintéressante.

Pas les filles – avec elles, j’ai un rapport de rivalité. LynnLae, je l’ai tellement haïe pour s’être envolée sans moi. Sans que je lui manque un seul instant. Ce genre de fille brûle sans ajout de carburant. Elles n’ont besoin de personne. Et c’est les gens comme moi qui s’y crament.

C’est pas que de m’être relue, je crois. C’est Spotify qui, depuis trois semaines, se plaît à me repasser tous les groupes dont j’ai aimé les titres sur les samplers Elegy. J’ai l’impression d’avoir dix-sept ans, et l’urgence au bout des doigts. Icon of Coil, je veux dire ! Ou Culture Kultur.

22h27
♫ Hocico – Dog eat dog

Ça me rend heureuse d’avoir toujours de ces « chansons » à écouter, des titres passés inlassablement, 250 fois, plus ? D’avoir ces morceaux « bandes-originales » qui dessinent un parcours. Ça me fait du bien que d’autres mettent de la cohérence là où il n’y en aurait pas eu.

J’ai écrit à Julia, le 25 juillet 2013 : « Je suis une sorte de symboliste obsessionnelle. J'aime que l'écriture dévoile des réponses à des questions que je n'avais pas posées. J'aime qu'elle révèle un ordre, une cohérence. J'aime enfin qu'elle invente, qu'elle crée, qu'elle donne à voir ce qui avant elle n'existait pas. » Quand on ne peut pas faire ça, il y a les œuvres d’art qui jalonnent notre parcours, et qui s’en chargent à notre place.

23h08
♫ Informatik – The world belongs to us

Je me demande si pour les autres c’est aussi difficile que pour moi, d’imaginer que ce qu’ils sont, ils le partagent en large partie avec au moins l’un de leurs parents. Mon père m’a raconté hier soir que sa première année d’études post-bac s’est soldée par une ordonnance « de complaisance » justifiant son absence aux examens. Qu’il était suffisamment déprimé pour préférer l’armée aux études – mon père, le type qui a besoin de tout décortiquer pour l’apprécier. Le type pour qui l’autorité est presque toujours aveugle. Le type à qui je ressemble beaucoup – et en même temps, pas du tout. C’est assez perturbant de voir sa vie ramenée à un ensemble de gènes, ou à un bout d’éducation (qui a pris parce que les gènes…)

Comme mon père, je suis irascible et impatiente. J’ai un avis sur tout et souvent une manière péremptoire de l’exprimer. Nous sommes timides, nous cherchons à être appréciés.
C’est la première fois que je dis « nous » en pensant à mon père. La première fois que je veux bien rendre à César ce qui lui appartient, et que je pense à nous comme à des êtres reliés par le sang.

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