Mercredi 4 décembre 2019
Vous êtes plusieurs à m'avoir laissé des commentaires sur mes derniers billets... Ils étaient dans la file "en attente de modération" sur Blogger et je n'avais reçu aucune notification! :/ C'est réparé, vos commentaires sont postés. Je vais aller modifier les paramètres.
Toutes mes excuses !!!
(du coup, je vous ai répondu, mais encore faudrait-il que vous vous souveniez où vous aviez posté... C'était sur "La Volte", "Drunk Movement IV" et "Et enfin le silence"...)
Être
Mardi 3 décembre 2019, 20h33
♫ D-Side-Elegy-H'n'H
Je crois que j'ai compris pourquoi je n'arrivais pas à me sentir proche des militants, quelle que soit leur cause. Leur monde est petit. Une fois qu'ils se sont engagés, ils ne voient plus qu'à travers ce prisme et ils analysent tout à travers lui, le "système" et les gens. Sur un blog féministe, un homme devient un hétéro cis. Sur un blog écolo, les gens deviennent des consuméristes aveugles. Pour un militant CGT, un patron dirige forcément une multinationale. Y'a plus de nuances, plus d'individus, juste des rouages.
♫ Ministry - Just one fix
D'après ce que j'en comprends, beaucoup de gens qui rejoignent un mouvement cherchaient, à l'origine, un sens ou un but. Ils sont heureux quand ils trouvent leur meute (terme absolument pas péjoratif dans ma bouche). Ils sont confortés, ils se sentent plus libres une fois reconnus, et désormais leur vie n'est plus vide de sens. Ils ont un combat qui les affermit, ils se découvrent de nouvelles ressources intellectuelles, de nouvelles forces vives.
Ça a l'air chouette. C'est comme la foi, un truc que j'envie un peu sans le comprendre.
♫ Undercover Slut - Evil Star Virus
On pourrait croire que je n'en ai pas, des convictions. Si j'en avais, je me battrais bec et ongles pour les défendre, hein ?
Ben non.
J'ai toujours écouté tout ce qu'on m'a dit. Pendant de longues années, j'ai été trop fière et furieuse pour entendre. Mais plus le temps passe, plus j'entends. J'entends des gens. Des individus. Des parcours, des logiques internes, qui ne se prêtent pas à la réduction, à la généralisation et encore moins au jugement. Évidemment, je déteste toujours des gens : mes voisins, certain(e)s de mes élèves (eh oui). Le plus souvent, c'est un sentiment qui ne perdure pas au-delà de la rencontre. Dès que je commence à parler aux gens, ou plutôt à les écouter parler, c'est l'empathie qui prend le dessus.
J'ai lu ça : "décidément, le monde des hommes ne me manquera pas."*
"Le monde des hommes". Ça va être dur de convaincre les gens que les féministes engagées ne sont ni castratrices ni... lesbiennes ?!... après ça.
Le monde des hommes.
Tu veux dire, celui des machos avec qui t'es sortie pendant des années, histoire d'assurer leur légitimité, pendant que dehors, des tas de gentils malingres à lunettes potassaient leur philo sans espoir de trouver un jour une gonzesse, faute de coller au cliché de la virilité ?
Je caricature exprès, évidemment. Parfois j'ai l'impression qu'il faut répondre aux excès par l'excès. J'ai envie de rendre hommage à Alan, Franck, Mathias, Fred et mon paternel. À Malo, Louis, Mathéo, Antoine, André, Nino et tous ceux de mes élèves que j'oublie, qui sont gentils, attentionnés, intellos, maigrelets ou grassouillets, artistes, littéraires, gays, autistes, haut-potentiel. À des garçons, des hommes, qui grâce à ce genre de discours, ne vont pas avoir moins de mal qu'avant à trouver leur place, alors qu'on est au putain de 21e siècle, et qu'on leur sert toujours un discours selon lequel ils ne sont pas des hommes.
La lutte pour l'égalité ne devrait JAMAIS utiliser les raccourcis des débiles contre qui on lutte.
C'est pas parce que je suis paresseuse que je ne milite pas. C'est parce que j'y crois pas. Les militants ne se battent jamais pour quelque chose, quoi qu'ils en disent. Ils se battent contre. Et, "accessoirement", ils ne se battent que pour eux-mêmes (par eux-mêmes, j'entends ceux à qui ils pensent appartenir.) Notre époque, c'est la foire à la "manif pour moi". Je me bats pour mes privilèges, mes convictions, mon statut, ma vision.
J'ai décidé que déjà, ce serait pas mal d'être moi sans entraves. J'ai aucune légitimité à l'imposer autour de moi, même si je suis persuadée d'avoir raison.
Dans mon monde, il n'y aurait pas de genre préétabli, déjà. Ça me gonfle au dernier degré. Je suis une femme, et même frangine a fini par me faire douter, à me rappeler tout ce qu'on était censées être.
Les gens ne vivraient pas dans des pavillons infâmes avec des pelouses bien tondues mais dans de belles maisons avec des "pelouses" de fleurs sauvages. Ils feraient absolument ce qu'ils veulent de leur déco, de leur cul, de leur vie, ... Ce serait le règne de la Volte.
Je serai moi et c'est déjà pas mal. La plupart des gens qui ouvrent leur gueule blâment le système - les autres, donc - sans avoir jamais essayé d'être autre chose. Quand ils essaient, il faudrait que le monde entier soit au courant qu'ils sont devenus intelligents.
Rencontrez des gens. Parlez-leur, au lieu de leur brailler votre hargne, vous êtes adultes, merde. (je te parle pas à toi, hein). Vous vous plaignez d'en avoir ras-le-bol de faire de la pédagogie. C'est parce que vous n'avez rien entendu. Si vous écoutiez Marley parler de son père absent ou Enzo de celui qui battait sa mère, vous comprendriez peut-être sur quelles failles et certitudes se construisent les enfants, des gens en devenir, vous savez, et peut-être que vous n'en auriez plus marre d'être pédagogues. Maintenant, si vous croyez que le combat passe par Twitter, évidemment, vous êtes foutus.
Oui, il faut des lois. Y'a des abrutis dehors qu'on n'aura qu'à force de sanctions. Pour que la société change, il faut museler les cons. Maintenant, si vous faisiez de la pédagogie à destination des gens prêts à la recevoir, plutôt que de foncer dans des murs, vous seriez peut-être moins désespérés.
Et j'dis ça comme si j'avais la science infuse. C'est pas le cas. Mais c'est pour ça que je dis "commençons par être ce que nous voulons être". Si on était tous ce qu'on voulait être, la société aurait pas la même gueule.
J'suis une privilégiée, je le sais. Mais ça reste un peu facile de me dire que tout ce que j'ai fait, je l'ai fait parce que j'avais le choix. Je parle pas de moyens financiers. Je parle d'être soi. Et ça, tout le monde peut le faire. Tu peux être cantinière et ne pas vouloir de gosses. Tu peux être éboueur et scientifique. Tu peux être catho et sortir avec autre chose qu'un technocrate macho. Tu peux danser en boîte et pas rentrer avec le dragueur à deux balles sous prétexte qu'il avait les yeux verts. Tu peux venir du 93 et avoir envie d'être bibliothécaire.
C'est vrai que je viens d'une famille qui m'a laissé le choix. En même temps, mon père m'a aussi fait comprendre qu'il avait un problème avec les gays et qu'il pensait que je "valais mieux" que caissière. Il m'a laissée faire, certes.
C'est l'éternel dilemme de La zone du dehors : "Tout est question d’éducation."
Mais alors, deux possibilités :
- c'est une question d'éducation : tu ne peux pas en vouloir aux gens d'être qui ils sont
- c'en est pas une. Tu peux leur en vouloir, mais pourquoi toi t'es tombé dans le panneau ?
* je ne cite pas ma source car mon but n'est pas d'agresser qui que ce soit. Je la donnerai en privé si ça vous intéresse, mais c'est quelqu'un que je respecte.
♫ D-Side-Elegy-H'n'H
Je crois que j'ai compris pourquoi je n'arrivais pas à me sentir proche des militants, quelle que soit leur cause. Leur monde est petit. Une fois qu'ils se sont engagés, ils ne voient plus qu'à travers ce prisme et ils analysent tout à travers lui, le "système" et les gens. Sur un blog féministe, un homme devient un hétéro cis. Sur un blog écolo, les gens deviennent des consuméristes aveugles. Pour un militant CGT, un patron dirige forcément une multinationale. Y'a plus de nuances, plus d'individus, juste des rouages.
♫ Ministry - Just one fix
D'après ce que j'en comprends, beaucoup de gens qui rejoignent un mouvement cherchaient, à l'origine, un sens ou un but. Ils sont heureux quand ils trouvent leur meute (terme absolument pas péjoratif dans ma bouche). Ils sont confortés, ils se sentent plus libres une fois reconnus, et désormais leur vie n'est plus vide de sens. Ils ont un combat qui les affermit, ils se découvrent de nouvelles ressources intellectuelles, de nouvelles forces vives.
Ça a l'air chouette. C'est comme la foi, un truc que j'envie un peu sans le comprendre.
♫ Undercover Slut - Evil Star Virus
On pourrait croire que je n'en ai pas, des convictions. Si j'en avais, je me battrais bec et ongles pour les défendre, hein ?
Ben non.
J'ai toujours écouté tout ce qu'on m'a dit. Pendant de longues années, j'ai été trop fière et furieuse pour entendre. Mais plus le temps passe, plus j'entends. J'entends des gens. Des individus. Des parcours, des logiques internes, qui ne se prêtent pas à la réduction, à la généralisation et encore moins au jugement. Évidemment, je déteste toujours des gens : mes voisins, certain(e)s de mes élèves (eh oui). Le plus souvent, c'est un sentiment qui ne perdure pas au-delà de la rencontre. Dès que je commence à parler aux gens, ou plutôt à les écouter parler, c'est l'empathie qui prend le dessus.
J'ai lu ça : "décidément, le monde des hommes ne me manquera pas."*
"Le monde des hommes". Ça va être dur de convaincre les gens que les féministes engagées ne sont ni castratrices ni... lesbiennes ?!... après ça.
Le monde des hommes.
Tu veux dire, celui des machos avec qui t'es sortie pendant des années, histoire d'assurer leur légitimité, pendant que dehors, des tas de gentils malingres à lunettes potassaient leur philo sans espoir de trouver un jour une gonzesse, faute de coller au cliché de la virilité ?
Je caricature exprès, évidemment. Parfois j'ai l'impression qu'il faut répondre aux excès par l'excès. J'ai envie de rendre hommage à Alan, Franck, Mathias, Fred et mon paternel. À Malo, Louis, Mathéo, Antoine, André, Nino et tous ceux de mes élèves que j'oublie, qui sont gentils, attentionnés, intellos, maigrelets ou grassouillets, artistes, littéraires, gays, autistes, haut-potentiel. À des garçons, des hommes, qui grâce à ce genre de discours, ne vont pas avoir moins de mal qu'avant à trouver leur place, alors qu'on est au putain de 21e siècle, et qu'on leur sert toujours un discours selon lequel ils ne sont pas des hommes.
La lutte pour l'égalité ne devrait JAMAIS utiliser les raccourcis des débiles contre qui on lutte.
C'est pas parce que je suis paresseuse que je ne milite pas. C'est parce que j'y crois pas. Les militants ne se battent jamais pour quelque chose, quoi qu'ils en disent. Ils se battent contre. Et, "accessoirement", ils ne se battent que pour eux-mêmes (par eux-mêmes, j'entends ceux à qui ils pensent appartenir.) Notre époque, c'est la foire à la "manif pour moi". Je me bats pour mes privilèges, mes convictions, mon statut, ma vision.
J'ai décidé que déjà, ce serait pas mal d'être moi sans entraves. J'ai aucune légitimité à l'imposer autour de moi, même si je suis persuadée d'avoir raison.
Dans mon monde, il n'y aurait pas de genre préétabli, déjà. Ça me gonfle au dernier degré. Je suis une femme, et même frangine a fini par me faire douter, à me rappeler tout ce qu'on était censées être.
Les gens ne vivraient pas dans des pavillons infâmes avec des pelouses bien tondues mais dans de belles maisons avec des "pelouses" de fleurs sauvages. Ils feraient absolument ce qu'ils veulent de leur déco, de leur cul, de leur vie, ... Ce serait le règne de la Volte.
Je serai moi et c'est déjà pas mal. La plupart des gens qui ouvrent leur gueule blâment le système - les autres, donc - sans avoir jamais essayé d'être autre chose. Quand ils essaient, il faudrait que le monde entier soit au courant qu'ils sont devenus intelligents.
Rencontrez des gens. Parlez-leur, au lieu de leur brailler votre hargne, vous êtes adultes, merde. (je te parle pas à toi, hein). Vous vous plaignez d'en avoir ras-le-bol de faire de la pédagogie. C'est parce que vous n'avez rien entendu. Si vous écoutiez Marley parler de son père absent ou Enzo de celui qui battait sa mère, vous comprendriez peut-être sur quelles failles et certitudes se construisent les enfants, des gens en devenir, vous savez, et peut-être que vous n'en auriez plus marre d'être pédagogues. Maintenant, si vous croyez que le combat passe par Twitter, évidemment, vous êtes foutus.
Oui, il faut des lois. Y'a des abrutis dehors qu'on n'aura qu'à force de sanctions. Pour que la société change, il faut museler les cons. Maintenant, si vous faisiez de la pédagogie à destination des gens prêts à la recevoir, plutôt que de foncer dans des murs, vous seriez peut-être moins désespérés.
Et j'dis ça comme si j'avais la science infuse. C'est pas le cas. Mais c'est pour ça que je dis "commençons par être ce que nous voulons être". Si on était tous ce qu'on voulait être, la société aurait pas la même gueule.
J'suis une privilégiée, je le sais. Mais ça reste un peu facile de me dire que tout ce que j'ai fait, je l'ai fait parce que j'avais le choix. Je parle pas de moyens financiers. Je parle d'être soi. Et ça, tout le monde peut le faire. Tu peux être cantinière et ne pas vouloir de gosses. Tu peux être éboueur et scientifique. Tu peux être catho et sortir avec autre chose qu'un technocrate macho. Tu peux danser en boîte et pas rentrer avec le dragueur à deux balles sous prétexte qu'il avait les yeux verts. Tu peux venir du 93 et avoir envie d'être bibliothécaire.
C'est vrai que je viens d'une famille qui m'a laissé le choix. En même temps, mon père m'a aussi fait comprendre qu'il avait un problème avec les gays et qu'il pensait que je "valais mieux" que caissière. Il m'a laissée faire, certes.
C'est l'éternel dilemme de La zone du dehors : "Tout est question d’éducation."
Mais alors, deux possibilités :
- c'est une question d'éducation : tu ne peux pas en vouloir aux gens d'être qui ils sont
- c'en est pas une. Tu peux leur en vouloir, mais pourquoi toi t'es tombé dans le panneau ?
* je ne cite pas ma source car mon but n'est pas d'agresser qui que ce soit. Je la donnerai en privé si ça vous intéresse, mais c'est quelqu'un que je respecte.
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